Ho ho ho. Et non, ce
n’est pas Noël, c’est simplement l’heure d’une nouvelle chronique. Et je vous avoue
que là comme ça, tel que vous me voyez derrière mon clavier, je suis
passablement guilleret. Gai comme pinson, plus jaune qu’un citron, et remonté
comme une pendule. Tout ça. Parce qu’aujourd’hui, je vais vous parler du film
Nerve, de Ariel Schulman et Henry Jost, deux réalisateurs ayant travaillé
notamment sur Paranormal Activity 3 et 4 (des films pour lesquels je n’ai…
aucun avis) et avec en personnages
principaux la très mignonne Emma Roberts et le non moins mignon Dave Franco. Et
j’aime autant vous dire que ça va swinguer.
De quoi que ça parle-t-il
donc ?
Nerve nous parle d’une jeune lycéenne,
Venus, alias Vee, un peu coincée et vivant seule avec sa mère suite à la mort
de son frère. Elle aimerait beaucoup sortir du cocon familial mais est incapable
de l’avouer à sa bien aimée génitrice. Faut dire que la demoiselle manque de
balls. Bon okay, c’est normal, c’est une fille, mais appelons ça des Psycho
Balls si vous le voulez bien. Bref, elle manque de Psycho Balls, et on le voit
bien vite quand on fait la rencontre de sa meilleure amie, Syd, une jeune femme
exubérante, clamant haut et fort n’avoir peur de rien.
FUCK YEAH!! DES NÉONS! |
Et elle le prouve, puisqu’elle
participe au jeu Nerve : un jeu underground dans lequel les gens peuvent
s’inscrire dans l’une des deux catégories : les Watchers (ou Voyeurs en
français, mais j’ai toujours préféré Shakespeare à Molière. Ce qui me vaudra
surement d’être renvoyé dans mon pays lorsque Marine Lepen passera présidente)
et les Players. Les seconds sont mis au défi par les premiers de réaliser des
challenges un peu loufoques et ballsy (oui cette chronique sera sous le signe
du testicule) contre une somme d’argent qui augmente au fur et à mesure de
l’intensité du défi. L’objectif : aller toujours plus loin pour gagner
toujours plus d’argent, et finir en finale. Pourquoi ? Je vous avoue que
j’ai pas compris car le film arrête assez rapidement de parler de la finalité
de la chose pour mettre en avant le côté bling bling et célébrité de ce jeu,
qui donne à des jeunes une notoriété express dont ils rêvent pour se
différencier de la masse.
Et notre amie Vee, bah elle
hésite un peu. Car elle a rudement besoin d’argent pour aller étudier dans sa
prestigieuse école d’art de l’autre bout des USA. Et elle a aussi besoin de
Psycho Boules (petite pensée pour l’Académie Française, que j’entends d’ici se
frapper le front d’indignation) pour avouer à sa môman qu’elle voudrait faire
ça. Et quelque part dans le fond de sa tête, elle se dit que Nerve pourrait
bien l’aider à obtenir ces deux choses. Donc elle craque, et se lance. Elle
rencontre rapidement Ian, un autre joueur de Nerve, et les Watchers
s’intéressent beaucoup à notre petit couple de fortune en les mettant sciemment
sur la route l’un de l’autre et en les défiant d’aller toujours plus loin dans les
défis, mais ensemble.
Au début c’est assez excitant,
et assez rigolo, d’autant que Vee se découvre en même temps que nous une ENORME
paire de Cérébro-Testicules, en faisant des trucs de fou. Seulement cela tourne
vite au cauchemar, et Vee se retrouve, malgré elle, piégée dans le jeu. Elle
n’a donc plus qu’un seul choix : détruire le jeu de l’intérieur, ou en
rester prisonnière à jamais.
Et je
m’arrête là sur la description des événements du film, car c’est avant tout un
film qui se voit. Je pourrais vous détailler les défis réalisés, mais cela n’a
pas vraiment de sens, en plus de vous gâcher la surprise. Je vais juste vous
dire rapidement comment elle parvient à détruire le jeu : en étant tuée en
direct, pendant que ses amis reprogramment le jeu (possible car il est Open
Source) pour qu’il dévoile les adresses IP et identité de tous les Watchers,
tout en les accusant d’être les complices d’un meurtre. Ce qui est d’ailleurs
absolument véridique. Ainsi notre héroïne prouve au monde que franchement, elle
en avait dans le pantalon. Enfin, dans le Psycho-Pantalon.
J’ajouterai
aussi que Messieurs Schulman et Jost sont sans doute de grands fétichistes du
néon. Il y en a absolument partout, c’est incroyable. J’imagine tout à fait les
accessoiristes :
-
Mec, on a reçu le matos commandé par les réal’.
-
Ah super, alors on a quoi ?
-
Des néons.
-
Comment ça des néons ?
-
Bah, des néons. Des bleus, des rouges, des
blancs, des petits, des grands…
-
Non mais merci, je sais que ce que c’est un
néon ! Mais on a quoi d’autre ?
-
Ah bah rien. Juste des néons.
-
Ah. Bon bah, fais péter. Ils veulent du néon, on
va leur en donner, c’est moi qui te le dis mon petit Roger !
(oui l’accessoiriste s’appelle Roger. Je ne sais pas
pourquoi, ça me parle un accessoiriste qui s’appelle
Roger.)
Mais alors, quoiqu’il faut
retenir de ce flim ?
Pour vous parler de ce que j’ai
retenu et qui m’a vraiment plu, il faut d’abord que je vous parle des deux
choses que j’anticipais avant d’aller voir le film.
La première chose à laquelle je
m’attendais, et dont j’avais peur, c’est d’un film un peu nanard écrit par des
vieux pour des jeunes. Ou plutôt pour l’idée qu’ils se font des jeunes. Donc
des jeunes à capuches pseudo rebelles, qui passent leur vie à envoyer des SMS
et à discuter sur Facebook. Et là… bon okay on a un peu ça, mais pas à
outrance. En fait on a plutôt l’impression qu’ils traitent les ados avec
bienveillance, en les considérant non pas comme des jeunes, mais comme des
jeunes adultes (notez le petit mot supplémentaire qui fait toute la différence.
Langue française, sublime que tu es –Marine, si tu m’entends, ne m’expulse
pas…). Oui nous avons des ados parfois un peu paumé, un peu révolté, mais pas
par pure esprit de contradiction mais bien parce qu’ils veulent trouver une
place dans la société, une place qui leur sera propre.
Cette image cache une TRÈS mauvaise blague |
Et tout ça passe par des
éléments de mises en scène qui, je dois l’avouer, m’ont assez bluffé, avec
beaucoup d’effets rappelant les messageries instantanées, obéissant aux codes
d’internet et de l’ergonomie, et qui m’a d’ailleurs fait me poser une petite
question concernant les placements produits : à quel moment le placement
de produit devient une façon d’ancrer son univers ? En effet, la scène
d’ouverture du film, c’est Vee qui ouvre son mac, ouvre Safari, Gmail, Skype, Instagram,
Flickr, etc… Bref, au début je me suis amusé à compter les placements produits.
Et arrivé au-delà de 8, je me suis dit que finalement, ça se voyait beaucoup
quand même. Et puis en y repensant, je me dis que le but n’était sans doute pas
de gagner un peu de thune, d’autant que tout le reste du film en est totalement
vierge. Pourtant y’avait moyen : il y a quand même tout un bon quart
d’heure du film pendant laquelle Vee et Ian font du shopping dans un grand
magasin. Franchement, placer un petit Gucci, ou un petit Louis Vuitton, c’était
hyper simple. Bah même pas. Ma petite âme de consumériste s’en retrouve toute
déçue… En revanche mon esprit de cinéphile apprécie vachement qu’on ne le
prenne pas pour une vache à lait.
Du coup je passe du coq à l’âne
(ouais après les couilles, la ferme) pour vous parler de la mise en scène.
Putain ça claque. Excusez-moi pour la grossièreté, mais nom de Dieu ! J’ai
vécu ce film comme rarement et c’est intégralement à cause de la mise en scène.
Les scènes sont presque toujours filmées soit par les téléphones des Watchers,
soit par celui de nos Players pour une immersion totale, et le reste du film
est totalement survolté, à tel point qu’on se rend compte avec difficulté qu’en
fait tous les événements à l’écran se déroulent sur une seule journée. La mise
en scène était tellement prenante que, sur la vie de Zach Braff, certaines
scènes m’ont laissé tout transpirant. A titre d’exemple, l’un des défis
consiste à traverser l’espace entre deux immeubles sur une échelle posée à
l’horizontale (au 6eme étage bien sur, on n’est pas des pédés). Nous voyons
cette scène deux fois : la première fois du point de vue d’un des
personnages qui échoue, et la seconde du point de vue d’un personnage qui
réussit. Et nondidju, j’ai vécu ces scènes comme jamais. J’ai tellement vécu
ces scènes que j’ai à peine remarqué ma voisine de cinéma, au demeurant
pourtant charmante, essayait de me broyer la main et le bras pour se persuader
que non, elle ne risquait rien. Oui mesdames et messieurs, j’ai complètement
ignoré une plantureuse poitrine féminine pourtant collée à mon biceps saillant
(oui je fais un peu de sport entre deux débats philosophiques) pour me
concentrer exclusivement sur les images qu’il y avait sous mes yeux. Et ça,
c’est quand même une performance qui mérite que je lui tire mon chapeau. Car je
porte le chapeau. Je trouve que ça me va bien.
Mais revenons à nos moutons (et
une autre transition agricole, une !) ou plutôt à notre film.
Qu’attendais-je d’autre ? Et bien quand j’en ai lu le synopsis, j’y ai
tout de suite vu le potentiel d’une super critique sur notre besoin permanent
de spectacle, et sur le côté spectateur de notre société (on pense notamment à
ces gens qui filment un accident au lieu d’appeler des secours). Je le
dis : je n’ai pas été déçu, et c’est une formidable critique de tout ce
que Youtube a pu créer de pire dans notre société. Et pourtant j’adore Youtube.
Donc si on résume, sont dénoncés
dans ce film : le besoin viscéral d’attention et de célébrité mais éphémère
des Players, la recherche malsaine de spectacle, la puissance de l’anonymat
d’internet qui pousse parfois à commettre des atrocités, la pression des pairs,
l’effet de foule, cette pseudo segmentation des gens entre les Players, ceux
qui agissent et prennent leur vie en main, et les Watchers, ceux qui préfèrent
regarder les autres faire. Et là y’a un paquet de choses à dire.
Cadeau pour vous, mesdames (ou messieurs d'ailleurs) |
Déjà, toute la partie recherche
d’attention, de célébrité, le besoin de spectacle, tout ça est représenté de
façon très malsaine, et un peu de recul suffit à se rendre compte que tout ça
est hyper flippant, même si les personnages ont l’air de trouver ça cool. Et
c’est ça en fait qui rend le message puissant : tout a l’air cool. Tout a
une image vraiment jeune, vraiment moderne, dynamique. L’esthétique est hyper
flashy, hyper funky, mais ce qu’on nous montre est à la limite de l’inhumain.
Oui car il faut pas oublier que ce sont une bande de mecs derrière leurs
téléphones qui font faire des conneries à d’autres gens, mettant leur vie en
danger, contre quelques dollars. Moi la dernière fois que j’ai vu ça, c’était
dans des arènes de gladiateurs.
Et d’ailleurs BIM !!
transition : en parlant d’arène, la finale de Nerve se tient dans une
arène, et est censé être un duel à mort. Sauf que Vee et Ian, se retrouvant
l’un en face de l’autre, refusent de participer. Surgit alors un autre
finaliste, imprévu au programme, qui lui chauffe la salle comme jamais pour
avoir le droit de tuer Vee. Et vous savez ce qu’ils font ? Bah ils votent.
Ils votent pour mettre à mort notre héroïne. Et devant nos yeux ébahis, on voit
des gars, qui pourtant la connaissent, voter pour qu’elle se fasse exécuter
sous leurs yeux. Et le « oui » l’emporte en plus ! On parle de
plusieurs milliers de personnes, dont des enfants et des parents, qui votent
pour mettre à mort une lycéenne au milieu d’une arène !
Et finalement, ce genre de truc
n’est pas très différents de ces types sur internet qui n’ont pour unique passe
temps de descendre bêtement tout ce qui passe sur la Toile. Ces mecs qui
poussent parfois des jeunes fragiles psychologiquement à la dépression. Ces
mecs « cools » qui prennent un gars au hasard dans le lycée comme
tête de turc et s’acharnent sur lui comme une meute de hyène sur une carcasse. C’est
juste le même esprit poussé à l’extrême. Le même qui pousse des manifestants à
affronter des CRS, des CRS à cogner sur des manifestants. Un simple effet de
groupe mélangé à de l’adrénaline. Et lorsqu’apparaît sur l’écran des téléphones
des Watchers et sur celui du cinéma « Félicitations, vous êtes complice
d’un meurtre », ce n’est pas seulement les Watchers qui sont interpelés,
mais aussi nous autres spectateurs.
Ce qui m’amène à un dernier
point : la différence entre Players et Watchers. Tout le film nous rabâche
que les Players sont les personnes au cœur de l’action, de courageux casse-cou
qui n’ont peur de rien, alors que les Watchers ne sont que des passifs restant
bien tranquille chez eux. Sauf que c’est faux. Le film nous ment. Bouh !
Vilain film. Et oui, car tous ces défis, ce sont bien les Watchers qui les
proposent. Qui a permis à Vee de rencontrer Ian ? Les Watchers. Qui a fait
risquer sa vie à Vee ? Les Watchers. Qui a cherché à faire perdre
totalement toute confiance en elle à Syd, la meilleure amie de Vee, en lui
donnant comme défi une chose qu’elle est viscéralement incapable de
faire ? Les Watchers.
Qui a voté
pour que Vee soit exécutée devant leur écran ? Les Watchers.
Et il est là
le nœud du message, mesdames et messieurs. Vous autres, Watchers, qui êtes
sagement à l’abri derrière votre écran et votre anonymat, êtes aussi acteurs
dans ce monde que les Players. Vos inactions devant le crime vous rend aussi
coupable que son auteur. Vous êtes aussi les acteurs de vos vies. Il vous faut
prendre vos responsabilités ainsi que la mesure de vos actes. Donc levez-vous,
militez pour un monde meilleur, allez aider votre prochains, écrivez des
chroniques sur un sujet qui vous passionne, bref, contribuez, vous aussi, à
rendre ce monde plus joyeux, plus lumineux qu’il ne l’était hier.